La devise inscrite sur le casque des Sapeurs-Pompiers de Paris : « FLUCTUAT NEC MERGITUR » qui se traduit par « battu par les flots mais ne coule jamais » et le slogan de ma société 4SA Guyane : « SAFETY BY CHOICE NOT BY CHANCE » tout ça pour dire que même si on croit avoir un bateau résistant, dame nature sera toujours plus forte que toi et qu’à un moment donné il faudra se résigner à faire un choix.
Piment Bleu a parcouru 5 600 milles soit 10 400 km depuis le 1er mai au départ de Kourou en mode chargé TDM avec 1,5 tonnes d’eau, de gasoil, d’avitaillement, de voiles de secours, de matériels de sécurité et médical supplémentaire, de pièces de rechanges, etc… Tout ça sur un bateau de 5 tonnes (lest compris).
La météo non favorable avec des vents contraires depuis la Martinique et les 3 dépressions dont KIRK depuis Bénodet a fait supporter des chocs répétés des milliers de fois sur la coque qui ont provoqués plus de 10 fissures sur plusieurs jonctions de contreplaqué marine. Après expertise nous constatons 8 fissures de 2 à 40 cm et 5 éclats de joints congés qui n’existaient pas au départ de Kourou.
Des fuites d’eau de mer sont également constatées sur les 2 reprises de cadènes de bas-haubans et sur celle de la trinquette.
Pour finir, un décollement de 30 cm dans l’angle inférieur droit du grand pare-brise faisant rentrer l’eau de mer à chaque vague passant sur le pont.
Toutes ces déficiences sont réparables sans aucune difficulté et même renforcées par le chantier de Christian Hernandez « MULTICAT ALGARVE » à Real de San Antonio au Portugal.
Le problème ne se situe pas à ce niveau, la question est : vais-je rencontrer des conditions similaires voir plus fortes dans la suite du parcours ? Evidemment oui dans l’Océan Indien, dans le Pacifique et dans le passage du cap Horn.
Plusieurs personnes expérimentées en construction et résistance de bateaux me font comprendre que ce n’est pas la faute du bateau qui est pensé et construit pour un programme bien définit mais que toutes ces avaries se renouvelleront si je remets Piment Bleu dans les mêmes conditions sur du long terme.
L’erreur ne vient que de moi : j’ai sous-estimé la difficulté et surestimé la résistance du bateau. Je pensais très sincèrement qu’un tel bateau pourrait passer et faire la boucle : Oui il pourrait avec un peu de chance… ou pas !
Depuis l’âge de 18 ans, au cours de mes diverses activités, j’ai déjà regardé la faucheuse 6 fois dans les yeux… N’étant pas un chat car je crois qu’ils ont 7 vies ? je pense que je vais devoir faire profil bas pour ne pas lui faire croire à de l’insolence. J’ai par ailleurs fait des promesses à ma famille, à mes amis et aux dirigeants de 4SA : SAFETY FIRST !
C’est la mort dans l’âme que je décide que ce TDM va pour le moment rester à l’état de rêve, que je vais honorer mes promesses et ramener Piment Bleu en entier à bon port.
Ma déception est énorme et il va me falloir du temps pour digérer cela, je n’aime pas l’échec et là je prends une méga claque, c’est la vie !
Je m’excuse auprès de toute la famille, amis, écoles et personnes inconnues qui suivaient mon périple depuis Kourou. Je vous remercie tous de votre intérêt pour ce projet, de vos nombreux messages de soutien et de l’aide financière que vous avez pu apporter. Je reste bien conscient d’être un hyper privilégié de la vie et un gosse pourri gâté mais jusqu’à présent j’avais toujours réussi tous mes chalenges.
Je risque d’être pendant quelque temps en mode furtif car j’ai besoin d’accepter cette décision et de reprendre la vie « normale » sans amertume et avec le sourire…
Je reste accroché à l’idée que l’essentiel est d’avoir essayé et qu’avec un bateau plus grand et plus adapté le projet avait plus de chance d’y arriver. Mon Piment Bleu est (j’insiste) un très bon bateau et j’ai bien l’intention de vivre de beaux voyages et escales avec lui. Je peux maintenant l’avouer, aucune assurance n’a voulu couvrir le bateau sur un tel projet !!!
Ma déception est le cumul de toutes les vôtres…
A bientôt,
Fred
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